❝ Toute passion abolie ❞ de Vita Sackville-West
❝ Au fond, elle s’était toujours sentie très seule, toujours en désaccord avec les opinions auxquelles elle devait se conformer. Parfois pourtant, il lui était arrivé de rencontrer un esprit avec lequel elle pouvait s’accorde. Par exemple ce jeune homme qui les avait accompagnés à Fatihpur Sikhri ; elle avait oublié son nom, peut-être même ne l’avait-elle jamais su ? L’espace de quelques secondes elle avait plongé son regard dans le sien, avant de chercher à cacher son trouble en s’éloignant brusquement pour rejoindre le vice-roi et ses officiers en casques colonial. De telles rencontres miraculeuses dans leur harmonie avaient été rares, et, heureusement, fugaces mais elle les croyait toujours possibles. Aujourd’hui, donc, elle acceptait de se sentir bien avec M. Bucktrout et M. Gosheron, ne se gênant plus pour avouer à M. Bucktrout qu’elle était incapable de faire la distinction entre impôts et contributions, ou à M. Gosheron qu’elle confondait les volts et les ampères. Jamais il ne l’accablaient de leur savoir, elle leur avait fait confiance et n’avait jamais été trahie. ❞
Traduit de l'anglais par Micha Venaille
Quel plaisir de lire ce roman !
Lady Slane, femme d’ancien vice-roi d’Inde et Premier Ministre anglais voit son mari mourir avant elle. Elle a alors 88 ans, 7 enfants plus bêtes les uns que les autres (excepté un ou deux peut-être) et une servante française à son service depuis toujours, qui se prénomme Genoux.
Toute sa vie a été dictée par son mari, par les règles de la haute société, ses enfants, ses devoirs d’épouse… Sa toute nouvelle condition de veuve lui permet de regagner sa liberté et de pouvoir s’éloigner de la société mondaine dans laquelle elle a évolué pendant des années.
Décidant de se reclure dans une maison secondaire elle n’accepte de voir que des personnes de son âge, la jeunesse lui étant devenue insupportable.
Elle va donc lier des amitiés tardives mais fortes, douces et pleines de confiance.
Elle se remémore sa jeunesse, ses voyages et surtout sa passion refoulée : la peinture.
Un voyage au cœur d’une vieille femme qui, lucide devant la mort et devant sa condition humaine, nous raconte sa vie et nous laisse entrer dans son intimité.
On ne regarde plus la vieillesse comme une fin ou comme quelque chose de négatif mais plutôt comme l’aboutissement d’une pensée, d’une vie bien remplie. Il nous tarde de devenir vieux pour pouvoir porter un regard si juste sur la vie.
Lady Slane a beaucoup a nous apprendre.